N°6 
édition du 5 avril 2000 
bi-mensuel de l'internet
culturel et politique
 
Sommaire 

 
EDITORIAL 
 1.Amendement Bloche : qui représente l'internet? 
 
ENJEUX  
2.Beau Geste ou pas? 
3.Lucasfilm : la force obscure du copyright. 
 
LES CONTENUS 
4.AOLBertelsmann? Qui quitte qui? 
5.Stephen King, premier best seller sur le net. 
6.Pianographie : le clavier qui démnénage. 
7.Qui peut faire fi du FIFI. 
 
 
 
TECHNOLOGIE  
8.Shockwave, ne pas se fier au site. 
9.Une méthode pour ressusciter les liens morts. 
 
CULTURE WEB 
10.Copyleft : travaux pratiques. 
11.Amis américains pour Léonardo. 
 
LE BILLET 
12. Universal France : l'internet, un peu! 
 
ON AURAIT PU... 
13. Journalisme en ligne. 
 
LES CLICS DE NOS LECTEURS 
14. Libres enfants du savoir numérique.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

 
EDITORIAL

1.AMENDEMENT BLOCHE : QUI REPRÉSENTE L’INTERNET ? 
A première vue, les protestations que les fournisseurs d’accès et d’hébergement élèvent contre le nouvel amendement Bloche s’apparentent à une tempête dans un verre d’eau, surtout comparées aux affaires autrement plus lourdes qui agitent l’internet. 
Pourtant ce micro débat soulève une question de fond : qui peut parler pour l’internet en général, qui représente l’internet ? 
Le nouvel amendement Bloche, comme le précédent, limite au minimum la responsabilité des hébergeurs sur les contenus. La revendication des intermédiaires techniques, parfaitement justifiée, qu’on se souvienne de l’affaire altern.org à l’origine de l’amendement Bloche, est donc satisfaite. 
En revanche, l’Association des Fournisseurs d’accès (et hébergeurs) proteste contre les nouvelles mesures d’identification mises en place par l’amendement. L’AFA regroupe les gros intermédiaires techniques ( France Télécom, AOL, Vivendi, Infonie) et est basée dans les locaux d’Infonie. 
En résumé, ces mesures obligent les producteurs de sites à indiquer le nom et l’adresse de leur responsable. Dans le cas des pages personnelles, l’Assemblée nationale a adopté un droit à l’anonymat : les auteurs de pages personnelles n’auront à s’identifier qu’auprès de leur hébergeur. Dans les deux cas, les hébergeurs seront responsables du respect de « l’obligation d’identification ». 
C’est ici qu’il y aurait problème : selon l’AFA,  la nouvelle loi obligerait les hébergeurs à vérifier l’identité des auteurs de sites. Le gouvernement lui oppose qu’« obligation d’identification » ne veut pas dire « vérification d’identité », et que Catherine Trautmann a explicitement écarté, lors du débat, la vérification d’identité. La position du gouvernement est enregistrée dans le journal de l’assemblée nationale. Il n’y aurait donc pas de désaccord de fond mais un désaccord sur l’écriture du texte qui peut être revue ultérieurement.  
Donc, pas de quoi fouetter un chat, si la campagne très politique menée par l’AFA ne soulevait pas directement nombre de questions sur l’organisation de l’internet. 
L’AFA soutient que les créateurs de sites, refusant de s’identifier, vont se tourner vers les hébergeurs étrangers. C’est le syndrome Laetitia Casta. L’AFA avait déjà fait le coup lors du premier amendement Bloche ; mais, cette fois, c’était les hébergeurs qui franchissaient le Channel virtuel ; maintenant, l’ « internet français », comme dit l’AFA, est menacé par une émigration massive. 
Peut on poser une question ? Qui autorise l’AFA à parler au nom de l’ « internet français » ? Quand les internautes ont ils délégué à AOL, France Télécom ou Infonie le soin de représenter leurs intérêts ? 
Sur les réseaux numériques, il n’y a pas d’alternative entre s’identifier et ne pas s’identifier. Il y a une alternative entre une identification purement et simplement imposée par l’hébergeur ou le fournisseur d’accès (c’est la situation actuelle), et une identification disposant d’une base légale. La différence n’est pas mince. 
 Si la loi définit les limites de l’identification, toutes les autres mentions apparaîtront pour ce qu’elles sont réellement : une mesure de sécurité au profit des hébergeurs, ou, pire, un moyen de se créer une base de données personnelles très profitable.  
Si la loi restreint au seul cas de procédure judiciaire la possibilité, pour l’hébergeur, de dévoiler l’identité du responsable du site, l’ « internet français » sortira de cette situation équivoque où chaque hébergeur suit ses propres règles. Car l’AFA a beau trouver admirable l’autorégulation « à la française », c’est l’opacité « à la française » qui règne sur une question aussi simple que la suivante: que faites vous, vous hébergeur, lorsque vous êtes saisi d’une demande de renseignements de la police, ou d’un « tiers concerné », comme une entreprise qui enquête sur un employé ? 
Il est naturel que les grandes sociétés de l’internet défendent leurs intérêts.  
Mais l’intérêt des internautes est ailleurs. 
-- Edgar Lulle -- 

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ENJEUX 

2. BEAU GESTE OU PAS ? 
Le groupement des éditeurs de services en ligne prépare une charte, soumise à ses adhérents, qui permettrait de lutter contre l’usage « abusif » du contenu des sites des entreprises de presse.. 
La démarche vise avant tout les sites d’alertes personnalisées qui font florès, les intranet d’entreprises et leurs revues de presse parfois « sauvages », bref tous ceux qui réorganisent l’accès aux informations produites et diffusées par les journaux électroniques. 
L’initiative suscite le débat.  
Il y a quelque chose de choquant dans certains services qui sont offerts aujourd’hui, quelque chose qui tient du parasite. Certaines revues de presse automatiques gomment presque, à l’usage, le médium qui a produit les informations. Leurs opérateurs le font souvent sans rémunérer ni le producteur, ni l’auteur. Il paraît normal que l’on s’en émeuve. 
Cependant, le Web, c’est l’hypertexte et la forme de citation particulière qu’il autorise. Sans possibilité de faire des liens, plus de Web, plus d’internet, on revient au Minitel en couleur, qui laisse chacun chaque source d’information chez elle... C’est la pyramide contre le réseau.  
Qui va gagner ? On sait que sur la Toile, la valeur ajoutée va vers celui qui donne le meilleur accès... Si les entreprises de presse veulent rester sur l’internet et déjouer les pillards... Une seule solution : être plus performants dans l’accès qu’elles offrent aux internautes. 
Ce n’est sans doute pas une charte d’auto régulation qui pourra régler le problème posé. Le droit de citation est flou et mal adapté aux nouvelles donnes du numérique. Il faudra bien un jour adapter en profondeur le code de la propriété intellectuelle, notamment sur ces questions. 
-- Pierre Bastogne -- 

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Sources: [http://www.mmedium.com/cgi-bin/nouvelles.cgi?Id=3413] 
[http://indigeste.ifrance.com/indigeste/] : Manifeste québécois contre le projet de charte.
Clic officiel :  [http://www.geste.fr]- le site du Geste, pas un modèle de mise à jour ! Attention, il y a bien une charte de l’internet, mais c’est celle issue de la mission Beaussant de 1996-97, première tentative de co-autorégulation de l’internet à la française.
 

3.LUCASFILM : LA FORCE OBSCURE DU COPYRIGHT. 
Lucasfilm vient d’annoncer un accord avec Sony online et Verant interactive pour développer et mettre en ligne, en 2001, un jeu reposant sur les personnages et l’histoire de StarWars. Voilà pour le côté « lumineux » de l’annonce. Car, en même temps, Lucasfilm est violemment critiqué par ses propres fans pour une conception passablement obscure du copyright. 
La société héberge sur son propre site StarWars.com les pages personnelles créées par les amateurs de la série. Dans ses pages, ils peuvent faire vivre leurs personnages favoris, les modifier, en créer de nouveaux, bref, jouer. Certains de ces fans de la Guerre des Etoiles se sont aperçus que le contrat d’hébergement prévoyait que le copyright de Lucasfilm s’étendait à la totalité de leurs propres créations. Selon la société, il s’agissait seulement pour elle de se protéger contre d’éventuelles revendications ultérieures, dans le cas où ses personnages s’avéreraient trop proches de ceux créés par les fans. Mais ces derniers font remarquer qu’avec une telle extension du copyright, Lucasfilm s’arroge le droit d’autoriser, d’interdire ou de modifier leurs créations. 
Cette affaire est une des plus significatives des questions juridiques que l’essor du virtuel va réellement poser. 
On peut considérer comme acquis, d’une part, que les jeux en ligne vont connaître un succès énorme, et d’autre part, qu’ils vont autoriser un niveau d’interactivité beaucoup plus grand, permettant aux joueurs d’intervenir aussi bien pour créer des personnages que pour définir les règles du jeu. En ce sens les jeux en ligne deviendront beaucoup plus proches des jeux traditionnels et feront appel, de manière plus puissante, à l’imagination des joueurs. 
L’idée de contrôler par l’extension du copyright l’imagination des enfants a quelque chose de monstrueux. Si la volonté de maîtriser la communauté des joueurs, cette sorte de grande ludothèque en ligne, se combine avec la revendication des ayant droit européens de revenir sur la copie privée numérique, il faut bien admettre que ce sera la victoire de Dark Copyright. 
Un conseil de notre psychologue : laissez vos enfants mélanger tous leurs oursons et mettre le bœuf de la crèche au beau milieu de la ferme. 
-- Edgar Lulle -- 

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Sources : [http://www.cnet.com] des 6 et 17/03/00
Clic officiel : [http://www.starwars.com]
 

 
LES  CONTENUS

4.AOL BERTELSMANN ? QUI QUITTE QUI ? 
Quand, il y a deux ans, en mars 1998, Bertelsmann cédait 25% des actions d’AOL en sa possession, profitant d’une embellie du cours d’une valeur souvent contestée, les choses étaient claires : le géant Bertelsmann décidait seul de la forme du partenariat qu’il entendait avoir avec AOL. 
Depuis, il y a eu le 10 janvier et la fusion AOL - Time Warner et quand on apprend que Bertelsmann va céder les actions d’AOL qu’il possède, on ne sait plus qui quitte qui. 
L’affaire est présentée par les deux entreprises comme une nouvelle alliance stratégique sur les contenus, Bertelsmann devenant un « fournisseur privilégié » de programmes pour AOL pour les quatre années à venir.  
Il y a cependant fort à parier que la sortie de Bertelsmann de l’actionnariat d’AOL ne se solde par la sortie des contenus de Bertelsmann de l’offre de AOL Time Warner, au moins sur le plan international. 
Dès le 13 janvier, les commentateurs soulignaient que Bertelsmann apparaissait comme le grand perdant de la nouvelle alliance, Time - Warner étant un des ses concurrents directs. Malgré les allégations des protagonistes, il s’agit donc bien d’un « divorce à l’amiable » de sociétés qui ne peuvent plus avoir de stratégies entièrement convergentes. 
Quel scénario ? On peut penser que Bertelsmann restera le fournisseur de contenus d’AOL... pour le marché allemand, laissant les choses sérieuses, à savoir l’international, à son concurrent Time Warner. 
C’est sans doute aussi cela la fusion AOL Time Warner, la fourniture dans le monde entier de contenus standardisés, tout en laissant à quelques entreprises le soin de fournir la couleur locale. 
-- Pierre Bastogne -- 

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Sources : [http://www.bertelsmann.com/press/press_item.cfm?id=1465] 
[http://www.zdnet.fr/actu/busi/a0012530.html]
 
5. STEPHEN KING, PREMIER BEST SELLER SUR LE NET 
Pendant que le Salon du livre de Paris découvrait les vertus supposées du e-book, un éditeur américain tout à fait traditionnel, Simon&Schuster, réussissait le premier best seller 100% internet, avec un titre de Stephen King, « Riding the bullet ». Plus de 500 000 lecteurs de King se sont précipités pour acheter l’ouvrage en le téléchargeant. 
« Riding the Bullet » est un récit de 66 pages, diffusé exclusivement en ligne, pour PCs, assistants personnels, et divers e-books (rocket e-book, et soft book reader). 
Le succès du titre numérique est un événement pour deux raisons. Il démontre d’abord que, loin d’être cantonnés aux petits tirages, les textes édités en ligne peuvent connaître le même succès que les livres imprimés. L’éditeur y a mis du sien, en choisissant l’un des auteurs américains les plus populaires, et en créant une sorte d’exclusivité au profit des lecteurs en ligne. En même temps, avec le succès de « Riding the bullet », les frontières du texte électronique sont une nouvelle fois déplacées. On considérait couramment le récit littéraire, écrit de manière linéaire, comme le plus mal adapté au numérique : il est démontré que les courts récits peuvent être édités en ligne et lus sur l’écran. 
Au delà de son succès, l’édition numérique de King a déclenché une polémique interne au monde de l’édition à laquelle le magazine Salon a consacré un dossier. 
L’affaire oppose Simon&Schuster (filiale de Viacom), et Fatbrain.com, une société d’édition en ligne qui revendique le deuxième taux de croissance de la Silicon Valley, derrière eBay. 
Fatbrain est un spécialiste de l’édition « corporate », c’est à dire la publication de documents par et pour les entreprises. Elle pratique aussi bien le tout numérique, que le tirage papier à la demande. Surtout, avec son site Mightywords.com, elle propose aux auteurs un dispositif d’auto-édition en ligne. Les auteurs doivent payer un dollar par mois pour se faire héberger par Mighty.com. Par contre, en cas de vente de leur ouvrage, les royalties sur le copyright s’élèvent à 50% du prix payé par l’acheteur (à la place des 5 à 15% habituels de l’édition papier). 
Fatbrain avait souhaité pouvoir distribuer le livre de King. Simon&Schuster a refusé, soutenant que, si Amazon et BarnesandNobles, auxquels il avait confié la distribution, ne sortaient pas de leur rôle d’intermédiaires, il considérait Fatbrain purement et simplement comme un concurrent. 
On semble bien loin ici des débats sur l’hypertexte et la littérature. 
Pourquoi Stephen King ne rêverait il pas d’avoir, à la fois, les 500 000 exemplaires vendus par Simon&Schuster, et les 50% de Fatbrain ? 
En attendant, un pirate, zurichois paraît il, a réussi à cracker le cryptage PDF du livre de King, qui circule maintenant gratuitement sur des newsgroups. Voilà qui va poser quelques problèmes à Adobe qui jouissait d’un confortable monopole sur le format PDF. CNet titre avec modération «horrors for publishing industry : King e-book cracked », ce qui ne nécessite pas de traduction. 
--Francis Linart-- 
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Sources : [http://www.salon.com/books/feature]] 
[http://zdnet.com] du 25/03/00
Clics officiels : [http://www.fatbrain.com] 
[http://www.mightywords.com]
 
6. PIANOGRAPHIQUE : LE CLAVIER QUI DEMENAGE. 
C’est un site qui aurait plu à Raymond Roussel ou Boris Vian. Les touches de votre clavier commandent à la fois un sample audio et un graphisme. Avec un peu d’exercice vous deviendrez un DJ multimédia. Pour débuter vous avez droit à trois pianos (trois collections de sons et d’images). Fini le tintement des pourboires économiques, faites vous livrer d’autres pianos virtuels en vous inscrivant sur la liste de diffusion.  
Le créateur de ce site, Jean Claude Lemarque avait reçu le Milia d’or en 97 pour le cédérom correspondant. Il propose aux sites commerciaux une adaptation de son dispositif qui a été repris par Grolier pour Webbyz…  
-- Francis Linart -- 
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Clics Officiels : [http://www.pianographique.com]
 
7. QUI PEUT FAIRE FI DU FIFI ? 
À Lille, du 14 au 19 mars 2000, s’est déroulée la deuxième édition du Festival international du film de l’internet, le FIFI, au logo colibri. Le FIFI souhaite mettre en valeur et récompenser les nouveaux acteurs du « digima », créateurs d’œuvres scénarisées uniquement conçues pour le réseau.  
Parmi les manifestations consacrées à ce que le numérique permet de nouveau et d’innovant, le FIFI est sans doute l’événement le plus original : c’est un festival, un vrai festival. Voitures en gare de Lille faisant pendant aux limousines cannoises de l’aéroport de Nice, costumes noirs et talkies-walkies, attachées de presse graciles et toujours un peu énervées... On s’y croirait. Vanité ? Non. Symbolique!  
Aujourd’hui, l’internet intéresse, fascine, excite mais demeure un média dévalorisé, un média « pas pour de vrai ». Voir sur l’internet, lire sur l’internet, ne peut constituer qu’une activité secondaire, vaguement futile et qui ne peut pas être culturelle, la culture, la vraie, restant celle des imprimés et des radios autorisées, du cinéma au cinéma. 
Faire le festival du film de l’internet, récompenser les créateurs d’oeuvres originales, les célébrer avant que la mode vienne totalement, et ce, dans la bonne humeur, c’est se faire plaisir et faire œuvre utile. 
--Pierre Bastogne-- 
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Clic officiel : [http://www.internet-film.org]
Parmi les œuvres primées, 19clics a choisi pour vous : 
La bande dessinée interactive “ John Le Crocheur ” de IO-interactifs 
(prix du public, meilleur scénario, meilleure direction artistique) 
[http://fifi.nirvanet.net/proj2k/selection_officielle/john_lecrocheur/jlc_master1.swf] 
 

 
TECHNOLOGIE

8. SHOCKWAVE, NE PAS SE FIER AU SITE 
Shockwave est un plug-in (module externe) de l’éditeur américain Macromedia. Il permet de consulter les sites faits avec la technologie Flash nettement plus interactive que le Html. C’est également un site de divertissement (entertainment) cher aux internautes américains.  
Admirative des animations Flash qui permettent des sites très esthétiques et minimalistes, je me connecte sur shockwave.com en me léchant les babines à l’idée de découvrir le site et surtout sa nouvelle version annoncée un peu partout. 
La première connexion m’apprend que la version de mon plug-in est trop ancienne pour consulter le site. Qu’à cela ne tienne, je télécharge la nouvelle. Le téléchargement se passe en deux temps et comprend un enregistrement où l’on me conseille vivement d’accepter la transmission de données en ligne pour que ma version soit toujours up to date. Jalouse de mon libre arbitre et aussi par esprit de contradiction, je décline cette proposition et achève le chargement. Enfin, les premières animations se font jour sur mon écran. Première rubriques proposées: jeux, bandes dessinées, musique, carte postale et créativité, recherche. 
-Je choisis d’aller voir le site Shockwave du jour qui met en scène Crikey, un sale môme à la mâchoire déformée et sa pulpeuse babysitter. Les épisodes proposés tels que « cotillon macabre » ou « destination l’enfer » sont interactifs et fascinent par leurs couleurs acides et leurs traits anguleux.  
-Je zappe sur la carte postale du jour: un aspirateur qui se met en marche, un rat qui traverse, la tête d’un camionneur américain à casquette. Je ne comprends pas très bien, d’autant que pour aller plus loin, Macromedia m’annonce que «certains nouveaux composants de l’application Shockwave ne peuvent être installés sans votre autorisation» et «nous vous conseillons donc de n’accepter ce logiciel que si vous faites confiance à cet éditeur (qui est... Macromedia!!)». 
-la rubrique «search» permet, en partenariat avec le moteur Looksmart, d’effectuer des recherches sur les seuls sites shockwave du web. Cette rubrique paraît la plus intéressante. 
-dans la rubrique «cartoons», je visionne une séquence interactive du personnage de Dilbert. Le téléchargement du module Shockmachine permet d’enregistrer la séquence afin de la visualiser hors ligne et de constituer une véritable bibliothèque d’animations Flash. 
-Dernier espoir: le New Shockwave.com qui titre ni plus ni moins «be the first to see the future». Un espace en trois dimensions donne accès aux rubriques search, music, games, shows, greetings, toon maker. D’emblée, on me propose à moi Maya de jouer au golf en me rappelant que «shockwave.com is cheaper than therapy». En attendant de voir apparaître mon gazon, je vais sur toon maker qui me promet de pouvoir créer mes «cool toons» et de les envoyer à tous mes copains qui devront ainsi télécharger le plug-in. Pendant le chargement du logiciel (là on ne m’a même pas avertie que j’allais encore encombrer mon disque dur, mais il fait beau et j’ai décidé d’être cool), on me propose de faire un puzzle qui me motive moyennement. Je préfère en profiter pour consulter la rubrique musicale. Mon pauvre butineur connecté à 40 000 bauds mouline, et moi je compatis, lorsque j’entends un «son of a bitch», probablement en provenance du puzzle mécontent de cet abandon. Suffoqué, mon navigateur déclare forfait et plante en beauté. 

Pour conclure, Shockwave est une application intéressante qui permet de consulter des sites et des animations plus créatives et interactives. Après avoir attendu les 26 séquences de Tim Burton (cf. un article du 3 mars de 19clics), voilà qu’on attend les animations de David Lynch et de James Brooks le père des Simpsons. En proposant à des créateurs connus de faire des séquences shockwave pour le web, Macromedia espère ainsi imposer son logiciel. D’ici là, le site proprement dit ne semble pas abriter de chef d’oeuvre, à part ceux du mauvais goût. Mais la fonction de recherche permet elle de découvrir des sites shockwave du web très différents, dont un certain nombre relevant de l’art interactif. Avoir ce module externe est aujourd’hui quasi indispensable et permet de découvrir une nouvelle dimension de l’internet, à condition de s’armer de patience car le chargement des animations est très long. 19clics vous conseille un certain nombre de sites utilisant cette technologie.  
--Maya Kalsé-- 

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Sources: [http://www.lesnews.net] du 20/03/00 
[http://www.vnunet.fr] du 23/03/00
Clic interne: Tim Burton et Shockwave: [http://www.altern.org/19clics/Numero04/2000-03-04.htm#14]
Clic officiel: [http://www.shockwave.com] 
le nouveau Shockwave, une fois le module téléchargé: [http://v2.shockwave.com/bin/V2/entry.jsp] 
Crikey: [http://www.crikeykidsnoop.com]
Pour en voir plus: Un site d’art interactif: [http://www.snarg.net] 
Un site japonais très design:[http://www.nagafuji.com/] 
Un site sur les aborigènes d’Australie: [http://www.indig.com/home-netscape.html]
 
 
9. UNE MÉTHODE POUR RESSUCITER LES LIENS MORTS. 
Un lien sur cinq âgé de plus d’un an mène à la page «Error 404. Page not found». Ces «hyperliens morts» (broken links) sont si fréquents qu’il a même été envisagé à un moment d’insérer des publicités sur ces agaçantes pages impasses. En réalité, très souvent les pages qui sont pointées n’ont pas été supprimées du web, mais ont simplement changé d’adresse. Elles existent, mais sous une autre URL.  
Thomas A. Phelps et Robert Wilensky, deux chercheurs de l’université de Berkeley de Californie, ont publié en janvier une méthode simple permettant de retrouver d’après son contenu une page déplacée. Ce procédé repose sur les «hyperliens robustes» (robust hyperlinks): une traditionnelle URL à laquelle est ajoutée une «signature lexicale» qui définit de façon unique la page d’après son contenu. Cette signature lexicale est composée des 5 mots les plus utilisés dans la page et les moins utilisés dans les autres pages du Web. Ce calcul de fréquence (TF-IDF, term frequency and inverse document frequency) présente l’avantage d’être facilement automatisable: il suffit de compter le nombre d’occurrence de chaque mot dans la page, de classer les résultats par ordre décroissant et d’interroger un moteur de recherche pour chacun d’eux pour en connaître la fréquence d’utilisation sur le web. Ces cinq mots qui caractérisent de façon unique la page doivent alors être adjoints à l’URL qui devient: http://www.quelquechose.dom/a/b/c?lexical-signature=«w1+w2+w3+w4+w5». Le moteur de recherche cherche alors la page ayant la signature lexicale donnée. 
Andrei Border, vice président de la recherche chez Alta Vista, juge ce système fiable, mais penche pour une signature lexicale de 8 mots: «le truc est de trouver la bonne formule de mots rares et qui rendent bien compte du contenu du document». La grande majorité des serveurs de butineurs accepteraient déjà ce type de requête, ce qui rend ce système trés vite opérationnel et à moindre coût. 
Après avoir, dans un article de dix pages, détaillé leur méthode en la comparant aux précédentes tentatives pour régler ce problème d’Erreur 404, les deux chercheurs en évoquent aussi les principales limites: 
-le système ne concerne que les pages déjà indexées par les moteurs. Les documents cryptés, les documents image ou vidéo en sont donc exclus pour le moment 
-le système dépend de la performance des moteurs de recherche 
-les documents évolutifs exigent de constamment modifier la signature lexicale. Ces pages ont heureusement en général une adresse fixe (comme les pages d’accueil par exemple). 
-des fautes de frappe ou autre peuvent générer une signature lexicale erronée, chaque correction sur la page entraînant une modification de la signature. 

Le système des hyperliens robustes est séduisant, d’autant plus qu’il repose sur le contenu des pages web, mais on a du mal à croire que seuls 5 mots suffiraient à caractériser de façon unique une page web. En tout cas il semble, à en croire les déclarations d’Andrei Broder, que les moteurs de recherche soient favorables à l’intégration de ce système qui devra également être intégré par les créateurs de pages web. Espérons que cette méthode soit adoptée et contribue à atténuer les déceptions et grognements des internautes. 
--Elsa Zakhia-- 

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Sources: [http://cnet.com/news/0-1005-202-156468.html] 
[http://www.mmedium.com/cgi-bin/nouvelles.cgi?Id=3316] 
[http://www.vnunet.fr] du 8 mars 2000]
Clic officiel: Article des deux chercheurs: «Robust Hyperlinks Cost Just Five Words Each»: [http://http.cs.berkeley.edu/~wilensky/robust-hyperlinks.html]
 

 
CULTURE WEB

10. COPYLEFT : TRAVAUX PRATIQUES. 
Devenir  une agence de presse directe où les informations sont placées sous licence copyleft telle est l’ambition de Hactivist News Service. Ce nom adopté « par fun » comme disent les créateurs  fait bien sûr penser à la liste de difusion américaine « hacktivism » qui a réagi dernièrement contre « échelon » et organise le boycott des sites Yahoo pour dénoncer le commerce d'objets du culte nazi sur le cyberespace. 
Le projet d’HNS est de mettre en circulation les informations sans les filtrer ni les traiter  afin d’en établir une circulation transversale –toutes reproduction et modification étant autorisées comme il est précisé en guise de copyright. 
Les informations qui ne passent pas dans les journaux, les radios ou les télés sont ici accessibles : appels, manifestations, pétitions que chacun peut trouver dans les domaines de son choix : droits sociaux, solidarité, logiciel libre,cyberespace …. Les dépêches sont rédigées directement par les acteurs des événements. Elles ne sont pas modérées , mais l’agence veille à ce que les inscriptions ne présentent pas de dérives racistes, sexistes, homophobes ou négationnistes « pas de querelles entre groupuscules non plus » (des avertis du militantisme !). 
Le site, nourri par les dépêches de correspondants, sélectionnés jusqu’à présent parmi les activistes radicaux (Act-Up, Ac…), se met en place progressivement et compte bien s’élargir. Il annonce pour bientôt la mise en ligne d’un manuel pour les futurs correspondants : aide au formatage des dépêches, mailing list, insertion des titres des dépêches d’HNS sur d’autres sites. 
Le portail est  hébergé sur le serveur samizdat créé lors des grèves de décembre 95 et connu pour accueillir des sites engagés dans des projets de contre-réseaux de communication alternative tel la revue Multitudes qui suivant la formule de Michel Foucault veut « prendre la politique de revers »  ou  s-l-u-t- : « Samizdat Linux User Team » groupe qui veut favoriser l’utilisation et la  maîtrise de Linux dans une perspective politique. 
-- Rose Hermitage -- 

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Source ; [http://www.zdnet.fr]  du 17/03/2000
Clic officiel : [http://www.samizdat.net/infos/hns/]
 

11. AMIS AMÉRICAINS POUR LÉONARDO. 
Léonardo, celui de l’Observatoire des Arts et TechnoSciences, a trouvé de nouveaux appuis dans le conflit qui l’oppose à Léonardo, celui de la Transacia Corporation (voir 19clics n°3) avec l’entrée en scène de RTMark. 
L’association américaine qui se présente comme le spécialiste du “sabotage” médiatique et de la contre-propagande humoristique mène en effet une campagne de soutien très active depuis les Etats-Unis. 
Léonardo Finances peut se faire quelques soucis puisque c’est RTMark qui a lancé, depuis le musée d’art moderne de New York, sa « déclaration de guerre » contre eToys et qui a remporté la victoire (voir 19clics n° 2). 
Dans le cas présent, RTMark renvoie à un site Leonardo qui relate l’historique des faits, incite à l’ envoi des mails de soutien à l’un et de protestation aux autres, présente des bannières  (celles-ci changent toutes les 30 secondes) composées par des artistes connus, vend des tee shirts au  nom de la campagne « my name is leonardo  sue me » ou « Son nom était léonardo » en français côté face (du tee-shirt). A ce propos, on ne peut que regretter l’absence de version française sur ces sites, y compris sur  celui d’Olats. L’observatoire est pourtant une association franco-américaine. 
Pendant ce temps, Léonardo Finances, et peut-être est-ce pour se dédouaner, apporte 2 millions de francs au site styledefrance, start up au service de l’artisanat d’art français. C’est en tout cas ce qu’annonce, sans faire référence au procès,  le journal du net décidément très e-commercely correct. 
-- Catherine Ficat -- 

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Clics officiels : [http://www.rtmark.com] 
[http://leonardo.c3.hu/]
Clics internes : etoys contre Etoy [http://www.altern.org/19clics/Numero02/2000-01-02.htm#2 
Leonardo : [http://www.altern.org/19clics/Numero03/2000-02-03.htm#1]

 
LE BILLET

12. UNIVERSAL FRANCE : L’INTERNET, UN PEU ! 
Lorsqu’il était, il y a encore peu de temps, le farouche président du SNEP (Syndicat national des éditeurs phonographiques) Pascal Nègre, P.D.G. d’Universal France, pourfendait le MP3, les pirates et la musique sur l’internet, souvent dans de joyeux amalgames. 
Le 15 mars dernier, Universal a ouvert un site où l’on peut télécharger gratuitement des extraits de musique. Tout animé, très sophistiqué, le site s’adresse avant tout à ceux qui ont une connexion rapide. Reprenant le concept de magazine magasin cher au patron de la FNAC, le catalogue d’Universal est mis en musique...  
Cela dit, on se demande bien à qui se site va servir ? Ce n’est pas encore une radio, ce n’est pas un site de vente de disques, ce n’est plus seulement un catalogue. Qu’est-ce que c’est ? Qui achète de la musique en se demandant : « Tiens, quel est le dernier disque d’Universal ? ».  
On a l’impression qu’Universal va sur l’internet parce qu’il faut bien, parce qu’il faut préparer le moment où l’on pourra télécharger de la musique « inpiratable », parce que... Pascal Nègre déclare que le site n’est pas prioritaire dans la stratégie de l’entreprise, il aura quand même couté environ 10 millions de francs. 
Mais l’internet n’est pas un média de diffusion supplémentaire qu’il faudrait aborder... Il ne suffit pas d’être sur l’internet, encore faut-il être dans le mouvement du réseau et le site d’Universal France est perpendiculaire au réseau. Il est en quelque sorte à l’internet musical ce que la Trabant est aux voitures du XXème siècle, au mieux un objet de collection. 
Maintenant, si le site préfigure ce que pourrait être un bouquet de radios sur le Web, Pascal Nègre fait ce qu’il avait dit qu’il ne ferait jamais : confondre les genres de la production, de la distribution et de la radio. 
-- Pierre Bastogne -- 

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Sources : [http://www.journaldunet.com/AFP/000313universal.shtml 
[http://www.zdnet.fr/actu/inte/a0013466.htm]
Clic officiel : [http://www.universalmusic.fr]

 
ON AURAIT PU...

13.JOURNALISME EN LIGNE. 
On aurait pu vous parler… de la commission de la carte d’identité des journalistes professionnels, la CCIJP, qui vient d’ouvrir son site. 
Dans un « FAQ », la commission précise les conditions d’obtention de la fameuse carte, signe de reconnaissance, coupe fil, carton d’invitation et autorisant les déductions d’impôts, notamment pour les journalistes en ligne. 
« Qu’en est-il du journalisme en ligne ? 
Pour obtenir la carte de presse, le demandeur doit naturellement remplir les mêmes conditions que ses confrères de la presse « classique », mais il doit - en plus - être obligatoirement rattaché à la Convention Collective Nationale de Travail des Journalistes et à l’une de ses qualifications ; son employeur devra soit correspondre à la définition d’une entreprise de presse, soit avoir à titre principal une mission d’information à l’égard du public (les statuts de l’entreprise doivent être fournis lors du dépôt de dossier de candidature) ; l’information diffusée doit être réactualisée périodiquement en fonction de la nature de l’information ; des copies d’écran en nombre significatif ainsi que l’adresse électronique de la publication en ligne devront être fournies et enfin les tâches exercées doivent être exclusivement journalistiques et s’exercer dans une structure journalistique (rédaction, direction de l’information…). 
S’il s’agit d’un support matériel (cd-rom, dvd…) sa périodicité doit être au minimum trimestrielle et sa régularité comparable à celle requise pour une publication imprimée. » 
C’est drôle, quand c’est en ligne, c’est toujours plus compliqué. Enfin, les choses bougent un peu. 
-- Pierre Bastogne -- 

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LES CLICS DE NOS LECTEURS

14. LIBRES ENFANTS DU SAVOIR NUMÉRIQUE. 
Les éditions de l’Eclat viennent de publier une anthologie du «libre» intitulée «libres enfants du savoir numérique» (le titre est un clin d’oeil à «libres enfants de Summerhill», livre paru en 1974 et qui décrivait une expérience d’éducation permissive).  
Rassemblée par Florent Latrive et Olivier Blondeau, la vingtaine de textes fondateurs de la pensée du libre porte sur la nouvelle économie du savoir, le protectionnisme intellectuel, les logiciels libres, l’open art... Dans un prochain numéro, 19clics en fera un compte-rendu. 
Persuadé de l’interaction positive entre le libre et l’économique, Michel Valensi diffuse simultanément l’intégralité de cet ouvrage gratuitement sur le web et en librairie pour un prix de 179F. 
Le texte en ligne est disponible sur Freescape, le portail du libre qui se met en place et qui nous promet d’être un «espace transversal de réflexion et d’information sur les pratiques du libre dans l’ensemble des domaines du savoir et de la création artistique». A suivre... 
--Elsa Zakhia-- 

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Clics officiels: Catalogue des éditions de l’Eclat:[http://www.lyber-eclat.net] 
Intégralité du livre en ligne: [http://www.freescape.eu.org/libres-enfants/index] 
Ou[http://www.samizdat.net/cyberesistance/freescape]
 
Livre papier: ISBN 2-84162-043-3, 503 pages, prix 179F.
Et sur le même sujet, lire dans ce numéro de 19clics l’article « Copyleft : travaux pratiques ».
 
 

© 19clics - décembre 1999 
Les pictos sont d'Agnès Lanchon