N°12
édition du 22 novembre2000
bi-mensuel de l'internet
culturel et politique
Page d'accueil
Abonnement
Archives
Clic sur 19clics

1.E Finita la Multimania!
Le camp des groupies de Multimania s'est brusquement réduit après l'annonce, début novembre, de son rachat par Lycos.
Si ZDNet et Transfert persistaient obstinément dans leur admiration, les médias financiers n'ont pas caché leur mépris: l'interview de Michel Meyer sur Bloomberg TV a été un moment fort de rude vérité capitaliste.

Le reproche formulé par les financiers est assez simple.
L'Offre Publique d'Échange de Lycos valorise l'action Multimania en dessous du cours d'introduction en bourse au printemps dernier.
Michel Meyer et ses associés devront attendre six mois de "lock-upperiod" avant de pouvoir revendre leurs nouvelles actions Lycos. Mais, à ce moment là, ils pourront réaliser définitivement leur investissement personnel dans leur société (avant l'introduction en bourse). Bref, ils échangent du papier contre du Lycos. Les autres actionnaires qui ont payé cash se voient imposer de revendre leur titre moins cher.

Michel Meyer a violé un tabou financier. Il n'était certainement pas responsable des coups de yoyo de son action. Mais le niveau du cours d'introduction devait correspondre aux perspectives de développement de son activité, par elle même, indépendamment de la bourse. L'échange avec Lycos, que les actionnaires du marché ne sont pas en mesure de repousser puisque l'OPE a été organisée avec les gros actionnaires traduit ce qu'il faut bien appeler une entourloupe aux détriments des petits actionnaires. Meyer avoue d'ailleurs lui même que garder le titre est une mauvaise idée!
Dans ces conditions, le débat sur la permanence de la marque Multimania est tout bonnement de la poudre aux yeux.
Multimania souligne qu'il rejoint Tripod, Caramail, Spray, marques européennes toutes plus sympathiques les unes que les autres, qui vont lui donner la "dimension critique". Vous avez le droit d'y croire.
Mais Lycos Europe c'est surtout Bertelsmann et Lycos USA, c'est aussi Terra Networks, opérateur espagnol de télécoms. Il ne faudra pas être trop regardant sur l'indépendance des contenus. Depuis The Virtual Baguette, le rachat de la communauté indépendante Mygale, et le financement de son activité par la publicité, la stratégie de Multimania reste la même: acquérir, pour rien, l'indépendance du web, et la revendre sur le marché.
Il n'est pas certain que cela puisse passer encore longtemps pour un vrai "business model".

Dans "le train rentrant de Londres où il est allé présenter l'OPE aux analystes financiers", Michel Meyer répond à la question de Christophe Agnus (Transfert): "De l'esprit de The Virtual Baguette au giron de Bertelsmann, Multimania n'a-t-il pas perdu son âme? Non, je ne pense pas. Lycos est une société culturellement proche de nous. L'aventure continue. " L'âme de Michel Meyer, qui utilise le mot "deal" toutes les trois phrases, est un organe étonnant.
C' est une machine à retraiter les illusions pour fabriquer du cash. Elle cauchemarde sur la lock-up period (encore six mois!), mais elle continue mécaniquement à parler de culture et d'aventure.

En mars dernier, Multimania s'adressait à ses abonnés ainsi: "Devenir actionnaire de MultiMania c'est franchir un pas de plus dans la communauté".
La communauté des quoi?


Edgar Lulle (edgar.lulle@caramail.com)

 



© www.19clics.com - juin 2000