1.Encore la
liberté
Le numéro spécial "Libres enfants du savoir numérique" a été
bien accueilli et nous a permis d'avoir des échanges intéressants sur
la question du libre. Merci à tous. Merci en particulier à Richard Stallman
et John Perry Barlow d'avoir manifesté leur intérêt simplement et rapidement.
Nous nous demandions si ce n'était pas une sorte de péché d'orgueil,
une tendance à l'inactuel, que de se concentrer sur un tel sujet, au
moment où la société de l'information connaissait un avril très gris,
avec les krachs boursiers, les scandales ouverts ou larvés, le jugement
de Microsoft. Nous revenons sur ces questions dans ce numéro mais force
est de reconnaître qu'au contraire nous avions été actuels, trop actuels.
La Charte des éditeurs de presse et du Geste, réponse au conflit qui
les oppose aux agrégateurs et moteurs de recherche, pose en effet de
manière urgente toutes les questions débattues dans le numéro spécial
sur le libre, mais "à l'envers" comme dirait le Canard Enchaîné.
Nous ne prenons pas position dans le conflit privé qui oppose éditeurs
de presse et agrégateurs. Nous avions trouvé assez comique cette heure
de gloire de Jérémie Berrebi, patron de Net2One, au Sénat, avec cette
séquence reprise par la télévision, où un vieux sénateur essayait de
placer son petit neveu. Nous trouvons aussi désagréable cette sorte
d'ostracisme anti start up qui se développe chez les grands de l'édition.
Mais les éditeurs ont décidé de traiter cette question en posant des
règles générales, en prétendant les imposer non seulement à leurs concurrents
mais à l'ensemble des internautes, sous couvert de charte. Nous critiquons
le contenu et la méthode.
Le contenu, parce que la copie privée numérique et les liens hypertexte
sont les moyens techniques indispensables à l'expression sur le net.
Peu nous importe que la copie privée soit "seulement" une exception
au droit d'auteur et que la pratique des liens hypertexte n'ait aucune
base légale spécifique. Elles ont une base légale générale: la liberté
d'expression que nous voulons transformer, avec le net, en un véritable
droit à la communication pour tous. Inutile de préciser que l'affaire
du droit de prêt en bibliothèque et l'évolution générale du droit d'auteur
ne sont pas faits pour nous rassurer. La méthode, parce que, si c'est
ça, l'autorégulation, une régulation brutale, sans débat public, sans
les internautes et contre les internautes, et la transformation de droits
parfaitement légaux et légitimes en autorisations consenties par les
puissants, alors nous en viendrons à regretter le parlement, les juges,
et la vieille régulation républicaine.
L'internet, c'est la liberté.
Cette charte octroyée et cet internet censitaire nous déplaisent assez.
Edgar
Lulle (edgar.lulle@caramail.com)
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[http://www.19clics.com] - mai 2000
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